Bienvenue Mr Chance (Being There)

 

Un film d’Hal Ashby

 

D’après le roman de Jerzy Kosinski

 

Avec Peter Sellers, Shirley MacLaine, Melvyn Douglas, Jack Warden…

 

 

Peter Sellers est sans conteste l’un des comédiens américains les plus intéressants que l’on ait découvert au cinéma entre les années 50 jusqu’à sa mort en 1980. Du Dr Clouseau de la série Panthère Rose en passant par Docteur Folamour, de Stanley Kubrick, le comédien a imposé un style particulier, comique décalé, comique de génie. Une carrière qui fut aussi entachée de nombreux travers, psychologiques, avec les femmes qu’il rencontra, avec sa mère omniprésente. Un destin singulier que Stephen Hopkins relata dans le film Life and Death of Peter Sellers, que je vous recommande vraiment pour la qualité de l’interprétation de Geoffrey Rush.

 

Being There (Bienvenue Mr Chance en français) est l’avant-dernier film du comédien, sorti en 1979, projeté au festival de Cannes deux mois avant son décès en juillet 1980.

 

Et c’est l’un des films les plus touchants de Peter Sellers, dans un rôle léger, aérien, naïf, humain. Il incarne ici Mr Chance, jardinier simplet d’un vieil homme, vivant reclus dans une propriété de Washington. A la mort de celui-ci, la bonne s’en va et Mr Chance doit lui aussi quitter la maison, se retrouvant dans les rues de Washington, dans un monde qu’il ne connaît pas. Renversé par une voiture alors qu’il observe une télévision, objet qu’il aime par-dessus tout, il est pris en charge par la femme d’un homme riche et malade, et à la suite d’une méprise, se retrouve propulsé au devant de la scène politique et publique.

 

Being There est avant tout l’histoire d’un homme, un homme naïf qui ne connaît pas le monde, le mal, les gens, les sentiments, qui n’a vécu qu’à travers les plantes et la télévision, sans la comprendre mais juste la regarder. Une naïveté, un naturel qui sera l’objet d’un malentendu par le monde politique et affairiste, comme une manipulation habile d’une image publique pour atteindre quelque dessein électoral.

 

Le film repose énormément sur l’interprétation de Peter Sellers, qui une fois de plus est excellent, donnant à cet homme simple une humanité remarquable. Un rôle difficile et qui est le cœur du film, une interprétation toujours sur le fil, un personnage complexe comme Sellers les appréciait.

 

A ses côtés, Shirley MacLaine et Melvyn Douglas incarnent le couple Rand, qui le recueille, l’héberge, le nourrit et le porte aux nues par méprise. Un couple bourgeois, à la fois riche et politiquement influent, qui va voir en Mr Chance un homme si naturel et pur qu’il va représenter pour eux l’exutoire de leurs problèmes (la maladie de l’homme, mourrant, le désespoir d’une femme délaissée, les ambitions frustrées par la maladie de l’homme, la succession difficile).

 

Hal Ashby filme avec beaucoup d’humanisme et sans effet inutile. La scène où Mr Chance se retrouve la première fois dans le « monde » est magnifique et accompagnée d’une musique toute aussi belle, comme le premier mouvement d’une symphonie, comme les premières mesures d’une nouvelle vie.

 

Being There termine sur une note légèrement irréelle, comme si un ange était passé et s’évanouissait doucement lorsqu’une âme s’envole. Sans doute l’âme de Peter Sellers, qui ne trouva pas son rôle le plus complexe mais sans aucun doute l’un des rôles les plus touchants de sa carrière.

 

A découvrir.

 

Arnaud Meunier

06/11/2005